Résumé( Structure narrative, technique narrative et symbolisme dans Heart of Darkness de Joseph Conrad)

Ibrahima Lo§

Abstract: Joseph Conrad’s Heart of Darkness (1902) is a semi-autobiographical novel in the form of a frame narrative (a story within a story). And to grasp the true meaning and purpose of the novel, it must be read not only as an adventure story, but also as a social critique of imperialism and an exploration of the human spirit and human morality. The novel explores the problematic of humanity’s inner savagery, hence the title Heart of Darkness. To better convey his message to the reader, Conrad creates a mode of narration in which the style and structure are well organized. Heart of Darkness is an extremely complex novel that comments on and highlights many of the major issues related to the colonization of Africa. The narrative structure is usually described as the structural framework that underlies the order and manner in which the story is presented to the reader. Conrad’s particular narrative structure allows him to make his messages clearly perceptible. My analysis will focus on three main areas: Ifirst discuss the narrative structure of the novel, then I talk about the narrative techniques in the novel and finally I analyze the symbolism in the novel.

Keywords: Novel, Narrative, Narrative Style, Narrative Structure, Symbolism

Résumé : Heart of Darkness (1902) de Joseph Conrad est un roman semi-autobiographique qui se présente sous la forme d’un récit-cadre (une histoire dans une histoire). Et pour saisir le véritable sens et le but du roman, il faut le lire non seulement comme un récit d’aventure, mais aussi comme une critique sociale de l’impérialisme et une exploration de l’esprit humain et de la moralité humaine. Le roman explore la question de la sauvagerie intérieure de l’humanité, d’où le titre Heart of Darkness  (Le cœur des ténèbres). Pour mieux transmettre son message au lecteur, Conrad essaie de créer un mode de narration dans lequel le style et la structure sont bien organisés. Heart of Darkness est un roman extrêmement complexe qui commente et met en lumière de nombreux problèmes majeurs liés à la colonisation de l’Afrique. La structure narrative, un élément littéraire, est généralement décrite comme le cadre structurel qui sous-tend l’ordre et la manière dont le récit est présenté au lecteur. La structure narrative particulière que Conrad s’est donnée lui permet de rendre ses messages bien perceptibles. Notre analyse sera centrée sur trois axes essentiels : nous discuterons d’abord de la structure narrative du roman, ensuite nous parlerons des techniques de narration dans le roman et enfin nous analyserons le symbolisme dans le roman.

Mots-clés : roman, narration, style narratif, structure narrative, symbolisme

Introduction

Heart of Darkness, publié par Joseph Conrad en 1902, est un roman qui se présente sous la forme d’un récit-cadre (une histoire dans une histoire). Il a d’abord été publié en trois parties, en février,  mars et avril 1899, dans le Blackwood’s Magazine (février 1899 était le 1000ème numéro du magazine : édition spéciale). Puis plus tard, en 1902, Heart of Darkness a été inclus dans le livre Youth : A Narrative, and Two Other Stories (publié le 13 novembre 1902 par William Blackwood). Le volume se composait de Youth : A Narrative, Heart of Darkness et The End of the Tether, dans cet ordre, afin d’illustrer vaguement les trois étapes de la vie. Pour les futures éditions du livre, Conrad a rédigé en 1917 une « note de l’auteur » dans laquelle il discute chacune des trois histoires et commente légèrement le personnage de Marlow – le narrateur des récits des deux premières histoires. Il mentionne également que Youth marque la première apparition de Marlow.

Le narrateur est l’un des éléments les plus importants du roman, qui témoigne de l’habileté de l’écrivain. Le choix du narrateur ou du point de vue est un signe de la vision profonde que l’auteur a du monde. Habituellement, dans les romans réalistes, le narrateur est choisi de manière à rendre la plausibilité plus facile pour le public grâce à l’utilisation d’un narrateur à la troisième personne et parfois à la première personne. Le choix du narrateur a une influence sur l’expression de l’objectif et des sentiments de l’auteur au public, ce qui prouve l’importance du narrateur et du point de vue dans le roman.

De nombreuses personnes ont proposé leur conception de la narration, et parmi eux nous pouvons citer Vladimir Prop. Une majorité des idées de ce théoricien russe sur la narration est présentée dans The Structuralism of the Fairy Tales. Selon Okhovat, Prop appelle ce changement de situation ‘événement’ et le considère comme l’un des principaux éléments de la narration. Il prête ensuite attention à la question de savoir quels sont les éléments constructifs des contes de fées qui sont fixes et ceux qui sont variables. Le dernier point est que le passage d’un état à un autre est appelé ‘mouvement’ par Prop. Une histoire doit avoir un mouvement pour être appelée histoire (Okhovat 819). Pour Ahmadi, Roland Barthes (1915-1980) considère également la narration comme un moyen de communication qui a un auteur et un récepteur. Il a une division en trois parties de la narration : (1) Le narrateur a le point de vue du protagoniste. Il n’écrit pas avec le pronom de la première personne. Parfois, il est le héros. (2) Le narrateur est impersonnel, omniscient, et selon Flaubert, il raconte l’histoire depuis un « statut divin ». Il est simultanément à l’intérieur des personnages et connaît leurs actions extérieures. (3) Dans le type de narration le plus récent, dont le modèle complet se trouve dans les œuvres de Henry James, le narrateur limite sa narration à la connaissance et à la sagesse des personnages et tout se passe comme si chacun des personnages était un narrateur (Ahmadi 234).

Le point de vue est le facteur le plus important pour former et donner une unité aux matériaux des parties de l’histoire. Il détermine la relation de l’écrivain avec le monde de l’histoire, et oriente les sentiments des lecteurs envers les personnages (Irani 379). Les narrateurs se distinguent les uns des autres par la part qu’ils prennent à l’histoire. Dans les narrations à la première personne, le narrateur est soit le témoin de l’événement, soit impliqué dans celui-ci, tandis que dans la narration à la troisième personne, il est en dehors de l’événement. Le narrateur omniscient est également en dehors des événements de l’histoire, mais il a l’avantage, par exemple, d’être au courant des pensées cachées des personnages et des événements qui se déroulent simultanément dans différents endroits. Ensuite, il introduit un narrateur qui est le récepteur de l’histoire et il y a certains personnages qui peuvent aussi raconter dans leurs propres termes (Cudden 260-261). Par conséquent, un écrivain doit tout prendre en compte dans le choix du narrateur pour pouvoir sélectionner son narrateur préféré, particulier de l’histoire. « En tant que lecteurs, nous regardons le narrateur plutôt que de communiquer avec lui. Alors que si nous communiquions avec lui, il y aurait des changements d’idées. En particulier, dans l’Addie blanche, le narrateur critique les aspects humains et n’est qu’un son incohérent » (Kooiman 17).

En choisissant notre sujet l’hypothèse que nous avons posée est que la technique narrative est le véhicule qui nous rapproche le plus du véritable sens du texte. Au sens le plus large, c’est la technique seule, comme le dit Mark Schorer, qui objective les matériaux de l’art, comme le symbolisme dans la fiction est la véritable source du thème (cité dans Aldridge 68). La littérature se distingue par ce que l’on peut décrire comme un « motif ». Le texte présente une sélection et une disposition d’éléments qui contribuent à son effet global. Le trait distinctif d’un récit est qu’il est capable de rendre compte de ses éléments constitutifs. Ces éléments n’apparaissent pas accidentellement dans le texte littéraire, car cela revient à simplifier à l’extrême la notion de spontanéité. Il existe un processus délibéré de sélection et d’arrangement des éléments narratifs dans le but premier de construire la structure. La structure de Heart of Darkness est le texte lui-même et le processus de sa création. Ce processus de création est ce qui constitue l’activité même de la littérature en tant qu’art visant à produire une esthétique. Reconnaître le fait qu’il y a un art que le créateur du récit utilise est primordial et suggère qu’il y a un art qui entre dans la fabrication du roman. Ainsi, la composition artistique et sa finalisation dans le récit de ce texte font que la technique narrative se distingue comme une préoccupation littéraire valide.

Les objectifs de la stylistique littéraire ne visent pas à démontrer la grandeur d’un auteur ou son insuffisance. C’est dans cette optique que notre étude vise à montrer la technique narrative utilisée par Conrad et démontrer comment cette  technique choisie contribue à la structuration et à la réalisation du récit dans sa totalité.

Cette étude a été conçue sur la base d’une recherche en bibliothèque et a utilisé la méthode de documentation pour la collecte des données. Nous avons également utilisé l’approche de l’analyse qualitative des données pour analyser les données puisque des mots, des phrases et des déclarations ont été utilisés pour exprimer les données collectées. La technique d’échantillonnage à dessein a été utilisée pour sélectionner le roman et le titre à l’étude. En effet, le roman est écrit en anglais et les événements liés à la technique narrative sont très utilisés dans le roman. Nous avons utilisé différents documents, articles et livres comme sources de données. Ces sources peuvent être qualifiées de sources primaires et secondaires. La source primaire est le texte littéraire lui-même, à savoir le roman de Joseph Conrad, Heart of Darkness. D’autre part, les sources secondaires comprennent tous les documents, publiés et non publiés, liés à l’étude en cours. L’analyse de documents a été utilisée comme outil de recherche pour recueillir des données précieuses pour l’étude en cours.

Józef Teodor Conrad Korzeniowski (1857-1924), auteur et maître marin anglais d’origine polonaise, est né le 3 décembre 1857 dans la ville de Berdyczów, en Ukraine, occupée par les Russes. Il est le seul enfant d’Evelina Bobrowska (1832-1865) et d’Apollo Korzeniowski (1820-1869), patriote, écrivain et traducteur d’œuvres d’auteurs tels que Victor Hugo et William Shakespeare. Joseph lira également leurs œuvres ainsi que celles de Charles Dickens. Conrad a voyagé dans de nombreuses régions du monde en tant que marin, mais son voyage en Afrique lui a fait vivre de nombreuses expériences qui l’ont obligé à écrire ce célèbre roman intitulé Heart of Darkness qui est son chef-d’œuvre. Charlie Marlow comme Conrad, étant bouleversé par le colonialisme et le comportement des hommes blancs en Afrique durant l’impérialisme, critique violemment le système colonial dans Heart of Darkness en utilisant un modèle de structure narrative mais aussi des symboles qui décrivent sa perception de l’impérialisme.

En menant l’étude, nous suivi des procédures pour recueillir les données pertinentes pour l’étude. Premièrement, le roman a été lu à plusieurs reprises et de manière critique pour comprendre ce qui y est dépeint. Deuxièmement, il a souligné les mots, les expressions et les phrases importants et a ensuite prélevé des extraits importants liés à l’étude. Troisièmement, nous avons organisé et vérifié les données identifiées ou les extraits sélectionnés en rapport avec l’étude. Quatrièmement, nous avons sélectionné les données les plus pertinentes qui peuvent aller dans le sens du sujet étudié. Enfin, des conclusions ont été tirées.

Dans Heart of Darkness, comme beaucoup de ses romans, Joseph Conrad s’impose une structure narrative pour faire passer son message et  un symbolisme pour décrire l’ambiance du système de l’époque. Cela nous amène à soulever un certain nombre de question à savoir : quelle est la structure narrative du roman? Comment l’histoire est-elle organisée? Et comment est-elle racontée? Existent-ils des symboles dans le roman ? A quoi font-ils référence ? Notre analyse sera donc centrée sur ces questions. Pour ce faire, nous discuterons d’abord de la structure narrative du roman, ensuite parlerons des techniques de narration dans le roman et enfin nous analyserons le symbolisme dans le roman.

1. La structure narrative

Heart of Darkness est un roman semi-autobiographique. Et pour saisir le véritable sens et le but du roman, il faut le lire non seulement comme un récit d’aventure, mais aussi comme une critique sociale de l’impérialisme et une exploration de l’esprit humain et de la moralité humaine. Le roman explore la question de la sauvagerie intérieure de l’humanité, d’où le titre Heart of Darkness (Le cœur des ténèbres). Pour mieux transmettre son message au lecteur, Conrad essaie de créer un mode de narration dans lequel le style et la structures ont bien organisés.

1.1. Le style narratif

Le style narratif peut tendre vers un courant de conscience, comme dans À la recherche du temps perdu de Marcel Proust. L’ensemble du récit peut lui-même être présenté comme un faux document, tel qu’un journal intime, dans lequel le narrateur fait explicitement référence au fait qu’il écrit ou raconte une histoire comme dans Dracula de Bram Stoker. Au fur et à mesure qu’une histoire se déroule, les narrateurs peuvent être plus ou moins conscients qu’ils racontent une histoire, et leurs raisons de la raconter, ainsi que le public auquel ils pensent s’adresser, varient également beaucoup. Dans des cas extrêmes, une narration-cadre présente le narrateur comme un personnage d’une histoire extérieure qui commence à raconter sa propre histoire, comme dans Frankenstein de Mary Shelley.

Heart of Darkness est un exemple de style narratif alambiqué à plusieurs niveaux qui présente une double trame : un narrateur non identifié, le « je » (première personne du singulier), relate une promenade en bateau au cours de laquelle un autre personnage, Marlow, raconte à la première personne l’histoire qui constitue la majeure partie de l’ouvrage. Par exemple, l’auteur dit: « Between us there was, as I have already said somewhere, the bond of the sea. (…) And this also, said Marlow suddenly, has been one of the dark places of the hearth‟. He was the only man of us who still „followed the sea. The worst that could be said of him was that he did not represent his class. He was a seaman, but he was a wanderer, too, (…) I, Charlie Marlow, set the women to work_ to get a job. Heavens! Well, you see, the notion drove me. I had an aunt, a dear enthusiastic soul » (Conrad 65)[1].

Même dans cette histoire alambiquée, il est dit qu’un autre personnage, Kurtz, a raconté une longue histoire à Marlow; cependant, rien n’est directement dit sur son contenu. Nous avons donc un narrateur« je » qui présente un conteur sous le nom de « il » (Marlow), qui parle de lui-même en tant que « je » et qui présente un autre conteur sous le nom de « il » (Kurtz), qui à son tour a vraisemblablement racontés on histoire du point de vue du « je ».

1.2. La spatialisation globale du livre

Si l’on se penche sur le monde présenté dans le récit de Conrad, on remarque le rôle significatif joué par les aspects spatiaux, dont l’importance est explicitée par la narration. La spatialisation globale du récit est indiquée par les références aux cartes de l’Afrique, trois en tout, que Marlow voit à divers moments. Le grand plan de l’action est un voyage cyclique, un voyage de découverte et de retour comme il le dit:

I didn’t want any more loitering in the shade, and I made haste towards the station. When near the buildings I met a white man, in such an unexpected elegance of get-up that in the first moment I took him for a sort vision. (…) He had been out nearly three years; and, later, I could not help asking him how he managed to sport such linen. He had just the faintest blush, and said modestly, ‟I’ve been teaching one of the native women about the station. It was difficult. She had a distaste for the work‟. Thus this an had verily accomplished something. And he was devoted to his books, which were in apple-pie order. (Conrad 84-85)[2]

Donc, le point de départ est la « civilisation » où l’on vit avec un « boucher à un coin de rue, un policier à un autre » ; mais le point d’entrée de la quête proprement dite est la ville comme un « sépulcre blanc » où Marlow passe par ce qu’il voit comme les portails des ténèbres gardés par les deux tricoteuses de laine noire. Après cette initiation, il est prêt à poursuivre son voyage de découverte qui l’oblige à se déplacer d’un endroit à l’autre en interrogeant les gens pour découvrir ce qu’il cherche

En portant notre attention sur le niveau du texte, celui des mots et de leur combinaison en propositions et en phrases, nous prenons conscience de l’existence d’un narrateur ou d’une situation narrative. La lecture de Heart of Darkness nous permet de remarquer rapidement que le narrateur est impliqué dans l’histoire, au moins dans la mesure où il la raconte à la première personne. Bien sûr, son récit ne tarde pas à céder la place à celui de Marlow, qui est également raconté à la première personne, mais la présence de guillemets au début de chaque paragraphe, ainsi que les interruptions occasionnelles, nous rappellent la médiation du premier narrateur. En raison de la manière dont le premier récit enferme l’autre, on peut l’appeler le récit-cadre. La situation à la première personne n’est bien sûr pas le seul mode de narration. D’autres possibilités importantes sont: la situation narrative d’auteur,  lorsque le narrateur a l’impression devoir l’action de l’extérieur; et la narration figurée, lorsque le point de vue est constamment à l’intérieur d’un des acteurs. Il faut ajouter qu’il arrive souvent que la situation passe d’une de ces situations de base à une autre, souvent même au sein d’une même phrase.

La comparaison du cadre d’ouverture et la brève conclusion de l’histoire par le cadre-narrateur permet d’arriver à ceci:

Forthwith a change came over the waters, and the serenity became less brilliant but more profound. The old river in its broad reach rested unruffled at the decline of day, after ages of good service done to the race that peopled its banks, spread out in the tranquil dignity of a waterway leading to the uttermost ends of the earth. (Conrad 66)[3]

À la fin du récit, les mêmes mots sont exactement utilisés pour désigner la rivière, mais le contexte et le ton ont changé: « The offing was barred by a black bank of clouds, the tranquil waterway leading to the uttermost ends of the earth flowed sombre under an overcast sky – seemed to lead into the heart of an immense darkness » (Conrad 164)[4].

Donc, le lecteur est obligé de conclure qu’un changement s’est produit chez le narrateur après avoir écouté l’histoire de Marlow – un changement qui est en quelque sorte analogue à celui qui a pu se produire chez le lecteur lui-même.

2. Les techniques narratives dans Heart of Darkness

La technique narrative de Conrad est une clé nécessaire pour explorer la psychologie colonialiste européenne du 19ème siècle. Elle fait partie du sens du texte, et pas seulement un sens pour le transmettre. Grâce à son habileté, il réussit à créer une technique dans laquelle le narrateur est à la première personne (narrateur anonyme ou Charlie Marlow) qui nous raconte l’histoire en analysant la situation de sa propre opinion chaque fois qu’il voit quelque chose à travers le système impérial blanc.

2.1. Le Narrateur du roman

La narration à la première personne est un mode où l’histoire est racontée par un seul personnage, qui parle à la fois pour et à propos de lui. La narration à la première personne peut être singulière, plurielle ou multiple. Elle peut être une « voix » autoritaire, fiable ou trompeuse et représente le point de vue dans l’écriture.

Les narrateurs se réfèrent explicitement à eux-mêmes en utilisant des mots et des expressions impliquant « je » (appelé première personne du singulier) ou « nous » (première personne du pluriel).Cela permet au lecteur ou au public de voir le point de vue (y compris les opinions, les pensées et les sentiments) du narrateur uniquement, et d’aucun autre personnage. Dans certaines histoires, le narrateur à la première personne peut faire référence à des informations qu’il a entendues de la part des autres personnages, afin d’essayer de donner un point de vue plus large. D’autres histoires peuvent passer d’un narrateur à l’autre, ce qui permet au lecteur ou au public de connaître les pensées et les sentiments de plus d’un personnage. C’est ce qui est fréquent dans Heart of Darkness de Joseph Conrad, où le narrateur est un « je » à la première personne qui raconte et observe la situation d’un côté à l’autre.

Tout d’abord, notre narrateur anonyme introduit le cadre de l’histoire: la soirée passée à bord du Nellie. Ce n’est qu’à travers lui que nous rencontrons Marlow. C’est Marlow lui-même qui raconte l’histoire encadrée, de sorte que la plupart des récits du roman sont racontés de son point de vue. Le fait que l’histoire soit racontée par Marlow peut affecter la façon dont les lecteurs voient les choses, en particulier Kurtz et la nature sauvage. Il est évident que tous les autres pensent du bien de Kurtz, même s’ils ne l’aiment pas particulièrement. Marlow, cependant, en vient à voir Kurtz comme un fou. Cette description peut ou non être exacte, bien que Marlow semble donner suffisamment de pensées logiques et de preuves pour soutenir son affirmation. De plus, la nature sauvage de l’intérieur, aussi effrayante soit-elle, ne semble pas affecter tous les personnages de la même manière. Marlow, en particulier, semble considérablement effrayé par elle, tout comme Kurtz. Encore une fois, cette description de la nature sauvage pourrait être exagérée parce que nous la voyons à travers les yeux de Marlow.

Alors, quel est l’intérêt de ce narrateur sans nom? Il est donc important de savoir l’intérêt de ce narrateur sans nom. Cela a beaucoup à voir avec la discussion sur le décor. Parce que nous avons un autre narrateur, nous pouvons arrêter l’histoire de Marlow et entendre des commentaires sur la Tamise et ses environs. Nous obtenons également ces superbes petites lignes sur la voix de Marlow, ce qui nous permet de le mettre en parallèle avec Kurtz. En bref, le narrateur sans nom est l’occasion de faire plus de commentaires, plus de rapprochements et d’exercer davantage les muscles littéraires de Conrad.

Mais en fait, la question ne s’arrête pas là. Il s’avère que Conrad glisse une petite réponse dès les premières pages, lorsqu’il décrit les opinions de Marlow sur la façon de raconter des histoires:

But Marlow was not typical (if his propensity to spin yards be excepted), and to him the meaning of an episode was not inside like a kernel but outside, enveloping the tale which brought it out only as a glow brings out a haze, in the likeness of one of those misty halos that sometimes are made visible by the spectral illumination of moonshine. (Conrad 68)[5]

2.2. La technique narrative

Techniquement et structurellement, Heart of Darkness est un récit encadré. Il s’ouvre sur la description par le premier narrateur anonyme de la trame, l’estuaire tranquille de la Tamise, qui s’avérera être une antithèse ironique du bassin du Congo, le cadre du récit intérieur. Il pense à la gloire de l’entreprise coloniale anglaise, lorsque Marlow lit presque dans son esprit et commence son récit pour la problématiser. Le narrateur anonyme et le reste des auditeurs sur la yole constituent le monde euro-centrique. Ils interviennent occasionnellement dans la narration de Marlow comme une légère résistance, lorsque celui-ci déstabilise les binaires coloniaux comme le « sale jeu » de l’Empire.

Néanmoins, l’interjection sceptique des auditeurs ne fait qu’augmenter pour le lecteur la crédibilité de l’expérience de première main de Marlow. De plus, le narrateur cadre décrit Marlow comme Bouddha et donc comme un sage. Les mythologies nous disent que les intrus dans l’Autre monde périssent souvent comme Kurtz ; mais les rares qui survivent à l’expérience, comme Marlow dans le cas présent, reviennent éclairés. Le récit extérieur est également un procédé littéraire standard pour renforcer l’impression de réalisme ; un certain nombre d’écrivains antérieurs, comme Emily Brontë, l’avaient employé avec un succès remarquable.

Selon Edward Said, la « méthode rétrospective » de Conrad permet à Marlow d’interpréter ce qu’il n’a pu expliquer au moment de l’expérience (Said viii). Dans son interprétation, Marlow se pose autant de questions qu’il y répond. Au cours du récit, Marlow effectue fréquemment des retours en arrière et des avancées dans le temps ; ce sont des indices importants de son expérience et dans sa tentative de la transmettre à ses auditeurs. Dans la première partie, par exemple, il interrompt le récit de sa conversation avec le fabricant de briques pour s’interroger sur la beauté du paysage, et  sur Kurtz qu’il n’a pas encore rencontré :

I lived in a hut in the yard, but to be out of the chaos I could sometimes get into the accountant’s office. (…). On day he remarked, without lifting his head, In the interior you will no doubt meet Mr Kurtz. On my asking who Mr. Kurtz was, he said he was a first class agent; and seeing my disappointment at this information, he added slowly, laying down his pen, « He is very remarkable person.‟ Further questions elicited from him that Mr. Kurtz was at present in charge of a trading-post, a very important one, in the true ivory-country, at the very bottom of there. Sends in as much ivory as all the other put together…  (Conrad 85-86)[6]

S’adressant à ses auditeurs, il demande : « Do you see him? Do you see the story? Do you see anything ?» Faire voir au lecteur le propos de l’artiste tel que défini par Conrad dans sa préface au Nigger of the Narcissus.

3. Symbolisme dans le roman

Le symbolisme est un mouvement littéraire et artistique apparu en France et en Belgique dans les années 1870 en réaction au naturalisme. Il est venu de Russie, notamment de Valery Brioussov, poète et fondateur du symbolisme russe. En réaction au naturalisme, les symboles permettent d’atteindre la réalité supérieure de la sensibilité et inspirent l’imagination. On retrouve le symbolisme dans la poésie, le roman, la musique… En ce qui concerne le roman, le symbolisme peut être abstrait ou physique comme nous allons le voir dans Heart of Darkness.

3.1. Les symboles abstraits

Heart of Darkness est un roman riche en symbolisme. La discussion suivante sera centrée sur les symboles abstraits tels que l’obscurité, la lumière, le brouillard…

L’obscurité est un symbole si important qu’il est mis en évidence dans le titre du roman. Comme on peut s’y attendre, les ténèbres représentent des idées telles que le mal, la folie et la dépravation. Marlow voyage dans les régions sombres et inexplorées du monde et découvre que le mal y vit, sous la forme des Européens qui devraient, en théorie, apporter la lumière. Cependant, dans sa quête d’ivoire, l’homme blanc a embrassé les parties les plus sombres de sa nature.

De plus, dans Heart of Darkness, le sens du mot « ténèbres » change tout au long de l’histoire pour symboliser différentes choses. Conrad utilise ce terme pour identifier des éléments sociaux et intellectuels afin d’aider le lecteur à se faire une idée de ses perspectives et de ses propres opinions sur le monde. Les deux interprétations les plus notables du mot « ténèbres » sont qu’il symbolise le racisme dans le monde et l’impact énorme qu’un monde non civilisé peut avoir sur une personne civilisée.

Le symbolisme du racisme est la première chose qui ressort de la lecture de cette histoire. Cette idée vient de la façon dont Joseph Conrad écrit sur les Blancs, considérés comme « civilisés », et sur la façon dont ils traitent les Noirs, considérés comme « non civilisés », en Afrique. Pendant la colonisation de l’Afrique, les Blancs se considéraient comme supérieurs à tout être humain de couleur différente de la leur (les indigènes). Ceci est bien montré lorsque Marlow décrit sa première impression de l’Afrique, lorsqu’il voit les conditions de vie des Noirs:

Black shapes crouched, lay, sat between the trees leaning against the trunks, clinging to the earth, half coming out, half effaced with the dim light, in all the attitudes of pain, abandonment, and despair. Another mine on the cliff went off, followed by a slight shudder of the soil under my feet. The work was going on…this was the place where some of the helpers had withdrawn to die…they were nothing earthly now, nothing but black shadows of disease and starvation, lying confusedly in the greenish gloom. (Conrad 83)[7]

Ces indigènes n’étaient pas des « aides », mais des esclaves contraints de travailler sous l’ordre des colons blancs.

Ensuite, Joseph Conrad développe un symbolisme alambiqué de la lumière dans Heart of Darkness, l’utilisant pour symboliser non seulement la bonté, mais aussi l’incertitude et la perte de perspective. Heart of Darkness est un voyage métaphorique entre la lumière ambiguë de la civilisation et le royaume des ténèbres du primitif. Ces opposés existent dans un pastiche déconcertant de bien et de mal, de force et de faiblesse, de vérité et de mensonge. Dans le monde de Marlow et Kurtz, comme dans les courbes tourbillonnantes du yin et du yang, chaque extrême contient en lui-même un élément de son opposé. Le lecteur est amené à se demander où se trouvent les ténèbres et à s’interroger sur ceux qui prétendent à la lumière.

Alors que Marlow suit la route de Kurtz au cœur de l’Afrique, ils sont tous deux propulsés dans une situation où tout est complètement changé. L’énigmatique Russe que Marlow rencontre à la gare intérieure pourrait parler à la fois pour Kurtz et pour Marlow lorsqu’il se lamente d’être « gone so far that I don’t know how I’ll ever get back ». Le voyage n’a pas de fin, dans le sens où les personnages, que ce soit par la mort, la folie ou la perte de leurs croyances, ne reviennent jamais à l’endroit où ils ont commencé.

Comme le laisse entendre le titre, l’interaction entre la lumière et l’obscurité est un thème récurrent du roman. Dans les mains d’un auteur plus transparent, la lumière pourrait peut-être symboliser la bonté, la civilisation et l’ordre, tandis que l’obscurité représenterait le chaos et le mal. Cependant, à travers les réfractions byzantines du récit de Conrad, le lecteur commence à sentir que la lumière symbolise, non pas la civilisation, mais la croyance hypocrite en une fausse civilisation, une apparence d’ordre et de raison qui masque une imperfection sous-jacente. Les premiers mots que Marlow prononce, « And this also has been one of the dark places of the earth », ne sont pas dirigés vers l’Afrique, mais vers Londres. Plus tard, il dit que l’Afrique « had ceased to be a blank space of delightful mystery. It had become a place of darkness ».

Au cours de ses ruminations sur la conquête romaine de l’Angleterre, Marlow déclare: « We live in the flicker – may it last as long as the old earth keeps rolling! » Son vœu pieux est évident dans le choix de ses mots. Un scintillement est une chose brève et transitoire, mais il souhaite qu’il dure aussi longtemps que la terre. Marlow reconnaît la futilité de son souhait lorsqu’il ajoute « But darkness was here yesterday » et donc, implicitement, qu’elle pourrait être de nouveau là demain. Commentant la beauté apparente de la fiancée de Kurtz sur une photographie, Marlow dit : « I know that the sunlight can be made to lie, too». Toutes ces réflexions sur la nature moralement ambiguë de la lumière amènent à se demander si l’obscurité ne serait pas elle aussi ambiguë. Cela place le lecteur dans un état mental similaire à celui de Marlow, un lieu de relativité morale et de définition changeante. Dès que Marlow entre en contact avec Kurtz, sa conception de la lumière et de l’obscurité, et par conséquent du bien et du mal, commence à se déformer. De sa rencontre avec Kurtz, il dit: « It seemed somehow to throw a kind of light on everything about me. It was not extraordinary in any way. And yet it seemed to throw a kind of light » (Conrad 145)[8].

En incluant l’expression « pas extraordinaire », Conrad avertit le lecteur que la perspective de Marlow a été inversée. L’expérience était en fait assez extraordinaire et extraordinairement sombre aussi, et pourtant Marlow remarque qu’elle « seemed to throw akind of light ». Marlow est passé dans le monde miroir de Kurtz, où la lumière devient l’obscurité et les ténèbres.

Le brouillard est en quelque sorte le corollaire de l’obscurité. Le brouillard ne fait pas qu’obscurcir, il déforme : il donne juste assez d’informations pour commencer à prendre des décisions, mais aucun moyen de juger de l’exactitude de ces informations, qui finissent souvent par être fausses. Le bateau à vapeur de Marlow est pris dans le brouillard, ce qui signifie qu’il n’a aucune idée de l’endroit où il va et qu’il ne sait pas si un péril ou des eaux libres l’attendent.

3.2. Les symboles concrets

Dans Heart of Darkness, nous pouvons trouver de nombreux symboles physiques, mais nous pouvons en sélectionner quelques-uns. De manière significative, un symbole physique peut être défini comme quelque chose de physiquement visible et tangible, contrairement à un symbole abstrait. Il peut s’agir d’eau, d’êtres humains, de bâtiments, etc. Dans Heart of Darkness, nous trouvons tous ces symboles, mais leur signification est différente.

Tout d’abord, le « sépulcre blanchi », qui est probablement Bruxelles, où se trouve le siège de la Compagnie, est l’un des symboles physiques. Un sépulcre implique la mort et l’enfermement, et l’Europe est en effet à l’origine des entreprises coloniales qui apportent la mort aux hommes blancs et à leurs sujets coloniaux ; elle est également régie par un ensemble de principes sociaux réifiés qui permettent la cruauté, la déshumanisation et le mal et interdisent le changement. L’expression« sépulcre blanchi » provient du livre biblique de Matthieu. Dans ce passage, Matthieu décrit les« sépulcres blanchis » comme quelque chose de beau à l’extérieur mais contenant des horreurs à l’intérieur (les corps des morts); l’image est donc appropriée pour Bruxelles, étant donné l’hypocrisie de la rhétorique belge sur la mission civilisatrice de l’impérialisme. (Les colonies belges, notamment le Congo, étaient connues pour la violence perpétrée contre les indigènes).

Le deuxième symbole physique est l’eau, par exemple, le fleuve Congo. Elle se trouve au début du roman et est pertinente dans le contexte de l’histoire. Le fleuve Congo est la clé de l’Afrique pour les Européens. Il leur permet d’accéder au centre du continent sans avoir à le traverser physiquement; en d’autres termes, il permet à l’homme blanc de rester toujours séparé ou extérieur. L’Afrique est ainsi réduite à une série de scènes bidimensionnelles qui défilent devant le bateau à vapeur de Marlow alors qu’il remonte le fleuve. Le fleuve semble également vouloir expulser les Européens d’Afrique : son courant rend la remontée du fleuve lente et difficile, mais le flux de l’eau rend la descente du fleuve, le retour vers la « civilisation », rapide et apparemment inévitable. Les luttes de Marlow avec le fleuve alors qu’il remonte le courant vers Kurtz reflètent ses luttes pour comprendre la situation dans laquelle il s’est retrouvé. La facilité avec laquelle il retourne en aval, d’un autre côté, reflète son consentement à Kurtz et son « choix de cauchemars ».

Enfin, le symbole humain est également très significatif dans le roman puisque les conditions des indigènes et des femmes permettent à l’auteur devoir l’impérialisme de manière négative. Le sentiment de Kurtz que sa maîtresse africaine fonctionnent comme des ardoises vierges sur lesquelles les valeurs et la richesse de leurs sociétés respectives peuvent être affichées et les affirmations fréquentes de Marlow que les femmes sont les gardiennes des illusions naïves semblent condamnable, Cependant, ce rôle de gardienne que leur donne Marlow est en fait crucial, car ces illusions naïves sont à la base des fictions sociales qui justifient l’entreprise économique et l’expansion coloniale. En retour, les femmes sont les bénéficiaires d’une grande partie de la richesse qui en résulte, et elles deviennent des objets sur lesquels les hommes peuvent afficher leur propre succès et leur statut. Nous voyons également comment l’impérialisme déshumanise les indigenes à travers l’observateur (Marlow): « A nigger was being beaten nearby .they said he had caused the fire in some way; be that as it may, he was screeching most horribly. I saw him, later, for several days, sitting in a bit of looking very sick and trying to recover himself » (Conrad 92)[9].

Comme Conrad, George Orwell a la meme conception de l’impérialisme dans son roman Burmese Days (1934) où il critique sévèrement le système des homes blancs par l’intermédiaire de son protagoniste Flory, l’observateur comme Marlow. Flory est toujours choqué lorsqu’il voit comment les indigenes sont maltraités comme il le dit:

I was in the Indian police for five years, and by the end of that time I hated the imperialism I was serving with bitterness which I probably cannot make clear.(..) I had reduced everything to the simple theory that the oppressors are always right and the oppressed are always wrong. (..) I felt I had got to escape not merely from imperialism but from every form of man’s domination over man. (Orwell 59)[10]

De plus, le lecteur peut se rendre compte de la même chose dans Lord Jim de Conrad où un indigène (Dain Woris) est dévoué à Tuan Jim comme un esclave et son maître : « There was something excessive, almost fanatical, in his devotion to his white lord! He was inseparable from Jim like a morose shadow. On state occasions he would tread on his master’s heels, one hand on the haft of his kris, keeping the common people at distance by his truculent brooding glances » (Conrad 27)[11].

Conclusion

L’objectif de cet article était de démontrer comment la structure narrative choisi par Conrad contribue à la structuration et à la réalisation du récit dans sa totalité et l’hypothèse que nous posions était que la technique narratives est le véhicule qui nous rapproche le plus du véritable sens du texte. Au terme de notre travail nous sommes arrivé à la conclusion que Heart of Darkness de Joseph Conrad est, de par sa structure narrative, un roman extrêmement complexe qui commente et met en lumière de nombreux problèmes majeurs liés à la colonisation de l’Afrique. Le roman est non seulement un récit d’aventure, mais aussi une critique sociale et une exploration de l’esprit et de la moralité humaine que Conrad raconte dans une structure narrative ordonnée avec des symboles significatifs.

L’étude s’est d’abord orientée vers un la conception technique du texte. La méthode part des termes généraux de la technique et, puis se resserre sur l’étude spécifique de la structure et encore plus sur le contenu symbolique du texte unique.

Ces considérations générales à spécifiques du contenu symbolique ont permis d’explorer la manière dont Conrad approche et transmet le sens complet de sa vision artistique. La forme, pour paraphraser Mark Schorer, est « le sujet » et la forme, au sens ultime, est une conception imaginative réussie (cité dans Aldridge 103).

Nous avons aussi montré que la structure narrative, un élément littéraire, est généralement décrite comme le cadre structurel qui sous-tend l’ordre et la manière dont le récit est présenté au lecteur. C’est la raison pour laquelle Conrad s’est donné une structure narrative particulière afin de rendre ces messages bien reçus. Dans la structure et le style narratif du roman, nous avons trouvé le narrateur parfois complexe narrateur non identifié (« je ») et parfois simple par exemple Marlow qui laisse le lecteur connaître son nom longtemps après avoir commencé son récit : « I, Charlie Marlow, set the women to work to get a job. Heavens! Well, you see, the notion drove me. I had an aunt, a dear enthusiastic soul » (Conrad 72)[12].

Ensuite, grâce sa technique narrative, Conrad réussit à donner un sens complet au roman. Ici, non seulement le lecteur rencontre différents narrateurs, mais il prend également conscience des informations claires et simples que Conrad cherche à donner. La plupart de ces informations sont symbolisées, ce qui permet de mieux comprendre et de bien appréhender  le roman dans son contexte, à savoir la colonisation. Nous avons vu cette symbolisation à travers certains symboles abstraits et physiques tels que l’obscurité, la lumière, le brouillard, mais aussi l’homme, la maison et l’eau, etc.

Enfin, l’analyse de l’intrigue, de la caractérisation et des stratégies de narration a permis de sortir l’engagement artistique de Conrad. Elle a permis d’établir que lorsqu’il est placé dans le courant de l’histoire littéraire, Heart of Darkness se glisse et s’intègre dans le canon des textes qui expriment les exigences ahistoriques de l’artiste, tant dans son tempérament que dans son exécution. Les choix de Conrad en matière de structuration de l’intrigue, de création de personnages et de positions narratologiques différentes sont des choix délibérés et non accidentels. L’étude a également démontré que Conrad a utilisé différentes positions narratologiques pour donner vie à la scène des personnages et à l’intrigue.

Travaux cités

Ahmadi, B. The Structure of Hermeneutics. 8th ed., Tehran, 2006.

Aldrige, W. John. Critiques and Essays on Modem Fiction. New York, The Ronald Press Co. 1952

Barthes, Roland. The Pleasure of the Text. London, Jonathan Cape, 1976.

Conrad, Joseph. Heart of Darkness. London, Blackwood’s Magazine, 1902.

———- Lord Jim, London, Penguin Classics, 1994.

———- Youth. London, J. M. Dent and Sons, 1946.

Cudden, J. A. Dictionary of Literary Terms and Literary Theory. Tr. Kazem Firouzm and. Tehran, Shadegan Publishers, 2001.

Irani, Nasser. The Art of Novel. 1st ed., 2001. Paper ID: 02014757 183 International Journal of Science and Research (IJSR) ISSN (Online): 2319-7064 Impact Factor (2012): 3.358 Volume 3 Issue 7, July 2014 www.ijsr.net Licensed Under Creative Commons Attribution CC BY

Kooiman, Michael. A critical linguistic introduction to narrative. Tr. by Abolfazl Horri, Vol. 1, Tehran, Farabi Cinematic Foundation, 2004.

Okhovat, Ahmad. The Grammar of Fictions. 1st ed., Isfahan, Farda Publishers, 1992.

Orwell, George. Burmese Days., New York, Harper and Brothers, 1934.

Said, Edward. .Joseph Conrad and the Fiction of Autobiography. Columbia University Press, 1966.

Shelley, Mary. Frankenstein, or the Modern Prometheus. London, Blackstone Audio, 1816.

Comment citer cet article:

MLA : Lo, Ibrahima. « Structure narrative, technique narrative et symbolisme dans Heart of Darkness de Joseph Conrad ». Uirtus 2.1. (avril 2022):  231-250.


§ Université Cheikh Anta Diop de Dakar / [email protected]

[1] Entre nous il y avait, comme je l’ai déjà dit quelque part, le lien de la mer. (…) Et cela aussi, dit soudain Marlow, a été l’un des endroits sombres du foyer ». Il était le seul homme d’entre nous qui  » suivait encore la mer « . Le pire que l’on puisse dire de lui est qu’il ne représentait pas sa classe. C’était un marin, mais c’était aussi un vagabond, (…) Moi, Charlie Marlow, j’ai mis les femmes au travail_ pour trouver un emploi. Ciel ! Eh bien, vous voyez, l’idée m’a poussé. J’avais une tante, une chère âme enthousiaste  (notre propre traduction )

[2] Je ne voulais plus flâner à l’ombre, et je me hâtai vers la gare. A proximité des bâtiments, je rencontrai un homme blanc, dans un accoutrement d’une élégance si inattendue qu’au premier instant je le pris pour une sorte de vision. (…) Il était sorti depuis près de trois ans ; et, plus tard, je n’ai pu m’empêcher de lui demander comment il faisait pour porter un tel linge. Il rougit à peine et répondit modestement :  » J’ai enseigné à une des femmes indigènes comment fonctionne la station. C’était difficile. Elle avait un dégoût pour le travail ». Cet homme avait donc réellement accompli quelque chose. Et il était dévoué à ses livres, qui étaient dans l’ordre des pommes. (notre propre traduction)

[3] Dès lors, un changement s’opéra sur les eaux, et la sérénité devint moins brillante mais plus profonde. Le vieux fleuve, dans son large cours, se reposait, imperturbable, au déclin du jour, après des âges de bons services rendus à la race qui peuplait ses rives, s’étalant dans la dignité tranquille d’une voie d’eau menant aux extrémités de la terre… (notre propre traduction)

[4] L’horizon était barré par un banc de nuages noirs, la voie d’eau tranquille qui mène aux confins de la terre coulait sombrement sous un ciel couvert- elle semblait mener au cœur d’une immense obscurité. (notre propre traduction)

[5] Mais Marlow n’était pas typique (si l’on excepte sa propension à filer des verges), et pour lui le sens d’un épisode n’était pas à l’intérieur comme un noyau, mais à l’extérieur, enveloppant le récit qui le faisait ressortir seulement comme une lueur fait ressortir une brume, à l’instar d’un de ces halos brumeux qui sont parfois rendus visibles par l’illumination spectrale d’un clair de lune… (notre propre traduction)

[6] Je vivais dans une cabane dans la cour, mais pour échapper au chaos, je pouvais parfois entrer dans le bureau du comptable. (…). Un jour, il me dit, sans lever la tête : « A l « intérieur, vous rencontrerez sans doute M. Kurtz ». Je lui demandai qui était M. Kurtz, et il me répondit que c’était un agent de première classe ; voyant ma déception à ce sujet, il ajouta lentement, en posant sa plume : « C’est une personne très remarquable ». D’autres questions lui permirent d’apprendre que M. Kurtz était actuellement à la tête d’un poste de traite, très important, dans le véritable pays de l’ivoire, tout au fond. Il envoie autant d’ivoire que tous les autres réunis… (notre propre traduction)

[7] Des formes noires s’accroupissaient, s’allongeaient, s’asseyaient entre les arbres en s’appuyant sur les troncs, s’accrochaient à la terre, mi-sortant, mi-effacées par la faible lumière, dans toutes les attitudes de la douleur, de l’abandon et du désespoir. Une autre mine sur la falaise a explosé, suivie d’un léger frémissement du sol sous mes pieds. Le travail continuait… c’était l’endroit où certains des assistants s’étaient retirés pour mourir… ils n’étaient plus rien de terrestre maintenant, rien que des ombres noires de maladie et de famine, couchées confusément dans la pénombre verdâtre. (notre propre traduction)

[8] Il semblait en quelque sorte jeter une sorte de lumière sur tout ce qui m’entourait. Ce n’était en rien extraordinaire. Et pourtant, il semblait jeter une sorte de lumière. (notre propre traduction).

[9] Un nègre était battu non loin de là. On disait qu’il avait causé l’incendie d’une manière ou d’une autre ; quoi qu’il en soit, il poussait les plus grands cris. Je l’ai vu, plus tard, pendant plusieurs jours, assis dans un coin, l’air très malade et essayant de se remettre. ( notre propre traduction )

[10] J’ai été dans la police indienne pendant cinq ans et, à la fin de cette période, je détestais l’impérialisme que je servais avec une amertume que je ne peux probablement pas exprimer clairement. (…) J’avais tout réduit à la simple théorie selon laquelle les oppresseurs ont toujours raison et les opprimés ont toujours tort. (…) Je sentais que je devais échapper non seulement à l’impérialisme mais à toute forme de domination de l’homme sur l’homme. (notre propre traduction)

[11] Il y avait quelque chose d’excessif, presque fanatique, dans sa dévotion à son seigneur blanc ! Il était inséparable de Jim comme une ombre morose. Dans les occasions officielles, il marchait sur les talons de son maître, une main sur le manche de son kris, tenant les gens du peuple à distance par ses regards truculents et maussades… (notre propre traduction)

[12] Moi, Charlie Marlow, j’ai mis les femmes au travail pour trouver un emploi. Ciel ! Eh bien, vous voyez, l’idée m’a poussé. J’avais une tante, une chère âme enthousiaste. ( notre propre traduction )